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Poulets de chair

La sélection génétique des poulets de chair

En élevage standard, les poulets sont sélectionnés génétiquement, nourris et complémentés pour grossir le plus rapidement possible. Ils atteignent aujourd’hui leur poids d’abattage en 35 jours, soit 4 fois plus rapidement qu’en 19501.

Cette croissance accélérée est à l’origine de nombreuses souffrances. Boiteries, malformations des os, défaillances cardiaques ou encore difficultés respiratoires viennent s’ajouter à des conditions de vie déjà difficiles.

Ross 308 : une croissance hors norme permise par la sélection génétique

Les poulets destinés à la production de viande sont le résultat d’une sélection génétique intense réalisée par 3 multinationales : Aviagen, Cobb et Hubbard. La souche à croissance rapide baptisée Ross 308 est la plus utilisée. Les oiseaux qui en sont issus peuvent gagner jusqu’à 110 grammes par jour2, alors que l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) recommande de ne pas dépasser les 50 grammes par jour3.

Le but de cette sélection est d’obtenir des animaux qui grandissent plus vite et produisent plus de viande. Un poulet produit aujourd’hui deux fois plus de viande de filet que dans les années 19504. Pour exprimer ce potentiel génétique, les poulets sont nourris avec une alimentation particulièrement riche et appétente. Dans la plupart des élevages, des compléments alimentaires sont distribués en permanence pour stimuler l’appétit des poulets et accélérer leur digestion.

Résultat : les poulets de la souche Ross 308 mettent aujourd’hui 27 jours pour atteindre le poids de 1,5 kg5, alors qu’il en fallait 120 dans les années 19506 ! En France, ils sont actuellement abattus à l’âge moyen de 35 jours, soit à 1,9 kg, et cette durée ne cesse de diminuer.

De graves conséquences sur les animaux

La croissance accélérée a transformé la morphologie des poulets. Leurs muscles se développent plus rapidement que les autres organes, en particulier le cœur et les poumons. Avec leur poitrine disproportionnée (pour produire des blancs de poulet), leur centre de gravité s’est déplacé, ce qui crée un déséquilibre entre l’avant et l’arrière du corps.

Les poulets qui grandissent de manière accélérée peuvent de ce fait avoir des difficultés à se déplacer, et souffrir de défaillances cardiaques ou respiratoires. Des études ont montré que les poulets Ross 308 sont moins actifs que leurs congénères à croissance normale. Même quand on leur en donne la possibilité, ils passent moins de temps à marcher, se toiletter, picorer, jouer ou se percher7, 8, 9.

Les scientifiques reconnaissent aujourd’hui de manière unanime que de nombreux problèmes de santé et de bien-être des poulets sont liés à cette croissance accélérée. C’est pourquoi l’EFSA recommande en 2023 d’élever des animaux à croissance plus lente10.

Difficultés à se déplacer et douleurs articulaires

Les problèmes de pattes tels que les déformations douloureuses des os ou les boiteries voire les paralysies sont une des principales causes de souffrance des poulets de chair en élevage.

Une étude a évalué que 99 % des poulets Ross 308 à croissance rapide avaient des problèmes de démarche (légers ou sévères) en fin de cycle d’élevage contre seulement 15 % des poulets à croissance normale11. Selon une étude française plus ancienne réalisée en 2004, ce sont en effet 75 à 90 % des poulets issus de souches à croissance rapide qui souffriraient de troubles de locomotion12. L’EFSA estimait en 2010 qu’environ 30 % des poulets de chair en élevages intensifs présentaient des anomalies aux pattes13.

Pour les scientifiques, ces problèmes sont une conséquence directe des changements morphologiques induits par la croissance accélérée. Ils sont principalement liés au surdéveloppement des muscles de la poitrine par rapport au reste du corps, et à la faiblesse des pattes.

Des études ont montré que les os des poulets issus de souches à croissance rapide sont plus fragiles : ils sont plus poreux et moins minéralisés que ceux d’une souche témoin à croissance plus lente14. La croissance rapide crée aussi des microfractures dans les os où les bactéries peuvent proliférer et causer une nécrose des têtes fémorales, une des causes majeures de boiteries15.

À cause de la douleur ressentie lors de leurs déplacements, ils se déplacent peu et passent deux fois plus de temps couchés que leurs congénères à croissance lente16. Or le contact prolongé avec une litière souillée cause des lésions de la peau, appelées dermatites de contact, très fréquentes en élevage. Selon une étude de 2008, 83 % des poulets issus de souches à croissance rapide souffriraient de lésions de la pelote plantaire, et 45 % de brûlures aux jarrets17.

Cœur et poumons défaillants

Pour parvenir à une croissance si rapide, les oiseaux consacrent l’essentiel de leur énergie au développement des muscles, aux dépens des organes essentiels. Ils ont donc un cœur et des poumons trop petits pour leur corpulence. Le cœur d’un poulet de 1 kg pèse aujourd’hui 20 % de moins que dans les années 195018.

La croissance est si rapide que le cœur et les poumons ne sont plus capables de satisfaire la demande en oxygène. Il en résulte une ascite (accumulation de liquide dans l’abdomen) ou un syndrome de la mort subite, deux causes de mort fréquentes en élevages19.

La mortalité des poulets à croissance accélérée est forte lors des premiers jours de leur vie ainsi qu’au-delà de 28 jours. La mortalité frôle les 4 % en seulement 35 jours d’élevage20.

Des poulets reproducteurs rationnés et affamés

Contrairement aux poulets destinés à la production de viande, les poulets reproducteurs ne sont pas abattus à 35 jours. Détenus dans des élevages bien distincts, ils doivent vivre plus longtemps pour donner naissance aux futurs poulets qui partiront à l’engraissement.

Leur croissance est si rapide qu’ils deviendraient obèses et ne pourraient même plus se reproduire s’ils mangeaient à volonté21. Ils subissent donc des restrictions alimentaires sévères durant toute leur vie, ne recevant qu’entre 20 % et 25 % de ce qu’ils mangeraient s’ils avaient libre accès à la nourriture. Comme la faim les pousse à boire davantage et à manipuler les abreuvoirs, ils sont aussi régulièrement privés d’eau pour éviter de salir la litière… Tout cela permet aussi de réduire les coûts de production22.

L’EFSA estime que les poulets reproducteurs souffrent ainsi durant toute leur vie de faim et de soif chronique. Un état de stress permanent les pousse à s’arracher les plumes (picage) et à agresser leurs congénères23.

Réduire de 78 % les douleurs insupportables

Une étude publiée par le Welfare Footprint Project, menée par des éthologues, des vétérinaires et des spécialistes du bien-être animal, a comparé les souffrances endurées par les poulets dans les élevages intensifs standard et dans les élevages respectant les critères du European Chicken Commitment (ECC). Les résultats montrent que l’adoption de races à croissance plus lente, requise par l’ECC, permet au moins de réduire :

  • de 24 % le temps passé par les poulets à souffrir de douleurs pénibles épisodiques,
  • de 66 % le temps passé à souffrir de douleurs continues invalidantes,
  • de 78 % le temps passé à souffrir de douleurs intenses insupportables. L’étude précise que chez l’être humain, ce type de douleur constitue le seuil au-delà duquel « de nombreuses personnes choisissent de mettre fin à leurs jours plutôt que d’endurer la douleur ».
Sources