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La vie des moutons

L’abattage des moutons et des agneaux

Plus de 5 millions de moutons ont été abattus en France en 20181, dont plus de 80 % d’agneaux de moins d’un an2. En France, environ 160 abattoirs permanents sont agréés pour les tuer3. Pendant la période précédant la fête religieuse de l’Aïd el-Kébir, des établissements temporaires peuvent également s’y ajouter4. Enquête après enquête, L214 lève le voile sur la violence des mises à mort. Effroyables lorsque la réglementation est respectée, elles sont encore pires en cas d’infractions ou d’abattages sans étourdissement préalable.

Des infractions récurrentes en abattage « standard » révélées par nos enquêtes

En France, sauf pour les abattages rituels qui bénéficient d’une dérogation, les moutons et les agneaux sont « étourdis » au moyen d’une pince à électronarcose avant d’être saignés. Il s’agit d’une pince électrifiée, dont les électrodes, appliquées de manière à enserrer le cerveau, les plongent théoriquement dans un état d’inconscience et d’insensibilité avant leur mise à mort.

Selon l’INRA, l’étourdissement par pinces électriques n’est pas toujours efficace : le taux d’échec dû à des problèmes de positionnement des électrodes ou au mauvais paramétrage de l’appareil se situe autour de 9 % pour les moutons5.

Lors de nos enquêtes en abattoirs de moutons et d’agneaux, nous avons constaté de manière récurrente de mauvais positionnements des électrodes (parfois appliquées sur le cou, voire sur le dos des animaux !), liés à des problèmes d’immobilisation des animaux, de fortes cadences, la méconnaissance par le personnel du matériel à sa disposition et des règles de « protection animale » en vigueur…). De nombreux animaux sont mis à mort sans vérification de l’efficacité de l’étourdissement. Certains reprennent conscience une fois suspendus à la chaîne d’abattage, et ne sont pas ré-étourdis comme l’exige la réglementation.

Voir à ce sujet nos enquêtes dans des abattoirs qui pratiquent des abattages pour des viandes standard, bio, AOP ou label rouge : Alès, Mauléon-Licharre, Le Vigan, Mercantour, Limoges, ou encore Arcadie-Sud-Ouest près de Rodez en 2020. À l’abattoir du Vigan, les pinces utilisées pour les moutons présentaient des défaillances connues sans qu’aucune mesure corrective ait été prise. À celui de Mauléon-Licharre, les électrodes étaient parfois appliquées sur le ventre ou l’arrière-train des animaux, des positionnements douloureux et parfaitement inefficaces pour provoquer une perte de conscience.

Ces observations sont loin d’être des cas isolés. Elles ont d’ailleurs été confirmées par plusieurs enquêtes officielles :

  • Un audit de l’Office vétérinaire européen (OAV) réalisé en 2015 dans des abattoirs français a relevé que les niveaux de courants électriques minimaux n’étaient pas toujours respectés pour les moutons, sans que cela figure dans les rapports d’inspection vétérinaires6.
  • En 2016, des inspections réalisées à la demande du ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation ont révélé que 80 % des chaînes d’abattage inspectées (abattoirs de boucherie*) présentaient des non-conformités en matière de « protection animale »7. En particulier, l’absence de surveillance du poste d’abattage est monnaie courante, et laisse libre cours aux cas de maltraitances involontaires ou intentionnelles.

En savoir plus sur l’abattage avec étourdissement

Moutons et agneaux sont les plus touchés par les abattages rituels sans étourdissement préalable

De tous les animaux élevés, les moutons et les agneaux sont en proportion ceux qui sont les plus touchés par les abattages rituels sans étourdissement préalable.

Entre 588 et 629 % des moutons et des agneaux seraient abattus de façon rituelle en France, et parmi eux, seuls 7 à 12 % seraient étourdis10.

En France (et plus largement au sein de l’UE), un article de loi permet en effet aux abattages rituels de déroger à l’obligation d’étourdissement avant la saignée11.

Cet égorgement sans étourdissement préalable est jugé « inacceptable » par la Fédération des vétérinaires européens (FVE)12, et va à l’encontre des recommandations de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA)13 pour qui les animaux devraient être systématiquement étourdis, en raison des souffrances nettement supérieures que l’égorgement sans étourdissement préalable engendre par rapport à un abattage standard.

Depuis 2013, l’abattage sans étourdissement est également dénoncé en France par le Conseil national de l’ordre des vétérinaires dont le président a déclaré : « Il est en outre irréfutable que les animaux souffrent lors de ces mises à mort14. »

En plus de ces souffrances indéniables, inhérentes à l’absence d’étourdissement préalable à la saignée, nos enquêtes en abattoirs nous ont permis de détecter de nombreuses infractions à la législation encadrant ce type d’abattage, censée permettre a minima de protéger les animaux de souffrances plus grandes encore. En particulier, l’absence de contrôle de l’inconscience des animaux avant de les suspendre par une patte au rail d’abattage (obligation systématique), des gestes de saignée inadéquats avec mouvements de reprise et de cisaillement qui prolongent la durée de l’agonie, ou encore une immobilisation des animaux inadaptée et/ou pendant une durée insuffisante qui là encore ralentit le processus de saignée et prolonge la souffrance des animaux, sont des infractions que nous relevons de façon récurrente lorsque nous pouvons avoir accès à des images de moutons ou d’agneaux abattus rituellement sans étourdissement préalable.
Voir à ce sujet nos enquêtes dans les abattoirs d’Alès, de Pézenas, de Mercantour, de Limoges, du Vigeant, ou encore de celui d’Arcadie-Sud-Ouest près de Rodez.

En savoir plus sur les abattages rituels sans étourdissement préalable

Pâques, Aïd el-Kébir : des fêtes religieuses où agneaux et moutons sont tués en masse, dans des conditions souvent précaires

En France, l’abattage des moutons et des agneaux connaît des pics saisonniers. En particulier, le flux d’animaux à abattre augmente fortement à l’occasion des fêtes de Pâques et de l’Aïd el-Kébir, où les abattoirs concernés peuvent voir le nombre d’animaux abattus quotidiennement doubler, voire tripler15. Lorsque cette surcharge de travail n’est pas compensée par du matériel et des salariés supplémentaires, ce sont les animaux et les salariés qui font les frais des cadences folles. C’est par exemple ce que nous avons constaté en pleine période de Pâques à l’abattoir de Mauléon-Licharre en 2016 : alors que l’abattoir était saturé d’animaux, des actes d’une violence inouïe ont pu être observés (animaux frappés, mal ou pas étourdis, conscients au moment de la saignée, voire découpés à vif). Même constat encore dans un abattoir de Nouvelle-Aquitaine la même année ou dans un abattoir de Haute-Loire en 2010 en période de l’Aïd el-Kébir : des temps d’attente non respectés, des animaux accrochés encore vivants et conscients qui continuent à se débattre une fois suspendus à la chaîne. Si ces fêtes religieuses voient les souffrances des animaux s’accroître, elles peuvent être l’occasion de prises de conscience, comme en attestent certains témoignages. Des alternatives au sacrifice de moutons voient également le jour. Voir le témoignage de Cécile, qui a arrêté de consommer les animaux à l’occasion de Pâques.
Références

1. Agreste, 2021. Statistique agricole annuelle, 62 p. (p. 22).

2. Agreste, 2021. Statistique agricole annuelle, 62 p. (p. 22).

3. Ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation, 2020. Liste des entreprises d’ongulés domestiques agréées. Catégorie : « abattoirs ». Espèce : « ovins ».

4. Ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation, 2021. Liste provisoire des abattoirs temporaires agréés pour la durée de la fête de l’Aïd el-Adha, accessible depuis la page « Aïd el-Kébir ».