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Enquête #2 sur la pêche au chalut dans la Manche

Le 23/02/2022

Enquête sur le chalutage de fond

L214 dévoile ce mercredi 23 février une nouvelle enquête, filmée par l’association Soko Tierschutz, à bord de chalutiers français et britanniques pêchant dans la Manche. Ces terribles images de la pêche de fond au chalut, qui se pratique habituellement loin des regards, sont rares.
Nous les avons montrées à Lynne Sneddon, experte internationale de la biologie des animaux aquatiques. Rappelant le consensus scientifique autour de la sensibilité des poissons, elle condamne fermement cette technique de pêche, véritable supplice pour les poissons, et qui ravage les fonds marins.
L214 demande aux candidats à l’élection présidentielle de s’engager à interdire la pêche industrielle et la pêche au chalut de fond.


pêche au chalut

Pêche intensive

Les images du chalutier anglais ont été tournées l’été dernier, et celles du chalutier français, en novembre 2021.
Le chalutier français est parti d’un port situé dans le Calvados en Normandie. La campagne de pêche a duré 5 jours. Le chalut (filet), d’une longueur totale de 150 mètres et d’une largeur de 30 mètres à l’entrée, a été déployé 27 fois (toutes les 3 heures). Plus de 10 tonnes de poissons commercialisables ont été ramenées au port, mais un nombre encore plus grand ont été pêchés et rejetés à la mer.

Un massacre pour les poissons

De nombreuses espèces de poissons et de crustacés ont été remontées dans les filets : plie, sole, requin-chat, bar, mulet, baudroie, raie, roussette, aiguillat, calmar, grondin, congre, crabe, araignée de mer, entre autres.

Les images montrent les longues agonies des poissons et autres animaux marins :

  • Chaque poisson capturé est écrasé sous le poids des milliers d’autres poissons lorsque le filet est traîné ou au moment de sa remontée.
  • Quand le filet remonte, le brusque changement de pression peut entraîner l’éclatement de la vessie natatoire des poissons. Ils ont les yeux exorbités.
  • Sur le pont du bateau, les poissons suffoquent. L’asphyxie peut durer de 25 minutes à 4 heures.
  • Les poissons qui n’ont pas de valeur marchande (espèces non commerciales ou animaux trop jeunes) sont rejetés à la mer, moribonds, et n’ont quasiment aucune chance de survivre.
  • Les poissons sont régulièrement piétinés.
  • Les pinces des araignées de mer sont arrachées à vif et les corps mutilés sont rejetés à la mer.
  • Les poissons et autres animaux marins qui ne sont pas rejetés à la mer ne sont pas étourdis, mais découpés vivants et conscients. Une des rares dispositions de la réglementation concernant les poissons exige pourtant qu’ils soient étourdis avant d’être tués.

Les poissons sont sensibles : un consensus scientifique

Spécialisée dans la biologie des animaux aquatiques, référence internationale concernant la sensibilité des poissons1, Lynne Sneddon est maître de conférences à l’université de Göteborg en Suède au département des sciences biologiques et environnementales. Elle a été la première à mettre en évidence les nocicepteurs (récepteurs de la douleur) chez les poissons.

Nous avons montré ces images à Lynne Sneddon : « J’imagine que le grand public sera très choqué de voir ces images, mais c’est ainsi que les poissons sont pêchés. C’est la pêche à grande échelle. C’est vraiment l’une des choses les moins respectueuses du bien-être que l’on puisse faire. […] Et je tiens à dire que nous n’accepterions pas cela pour un animal d’élevage terrestre. Personne n’accepterait ce genre de traitement pour les vaches, les porcs, les moutons ou les poulets. Et parce que c’est en mer et parce que c’est presque caché de nous, c’est caché du public. Les gens ne comprennent vraiment pas la façon dont les poissons sont capturés et tués. Et je pense que nous devons vraiment prendre conscience que c’est ainsi que les poissons sont capturés2 ».

Pour Lynne Sneddon : « Les poissons sont sensibles. Ils remplissent les critères de sensibilité. Ils sont capables d’établir des relations au sein de chaque espèce. Par exemple, la truite arc-en-ciel peut reconnaître jusqu’à 47 poissons apparentés. Ils sont capables d’établir des relations entre les espèces. Ainsi, de nombreuses espèces vont chasser avec une autre espèce. Par exemple, le mérou du récif corallien chassera avec la murène parce qu’ils chassent mieux ensemble. Ils sont également capables d’éprouver des émotions négatives telles que la douleur, la peur et le stress, et sont très affectés par ces situations, comme le seraient les humains. Mais ils recherchent également des expériences agréables3. »

Malgré le consensus scientifique concernant la sensibilité des poissons, la réglementation est minimale, et totalement ignorée. Pratiquement aucune mesure n’a été prise pour poser des limites aux souffrances infligées aux vertébrés de la mer de la même manière que pour les vertébrés terrestres.

Le chalutage de fond : une des pires techniques de pêche

Pour l’environnement, la pêche de fond est une des pires techniques de pêche. Elle détruit les fonds marins. C’est l’équivalent de la destruction par le feu des forêts tropicales.
Pour Lynne Sneddon : « C’est comme prendre une charrue géante et détruire un environnement. Tout un écosystème est détruit par ce type de chalutage. De nombreux appels ont été lancés pour l’interdiction de ce type de chalutage, en particulier dans les zones où les poissons se reproduisent, où ils laissent leurs œufs et où leurs petits grandissent, car ce que vous faites en réalité, c’est détruire les zones de reproduction de ces animaux4. »

Le chalutage de fond est une méthode de pêche très peu sélective. Tous les animaux marins sur le passage du filet sont remontés à bord, y compris des animaux qui ne seront pas commercialisés (espèces non ciblées ou animaux trop jeunes).
Contrairement aux dispositions de la réglementation européenne qui exigent que les « prises accessoires » soient ramenées pour être comptabilisées et contrôlées, on peut voir que les animaux marins non visés sont rejetés à la mer, en nombre bien supérieur aux animaux gardés.

Interdire la pêche au chalut de fond

Pour Sébastien Arsac, cofondateur de l’association L214 : « Parce que les poissons souffrent et que les écosystèmes marins sont au bord de l’effondrement, L214 demande aux candidats à l’élection présidentielle de s’engager à organiser la fin de la pêche industrielle, de la pêche au chalut de fond et de la pisciculture intensive sous 10 ans.
En parallèle, il est urgent de démocratiser l’alimentation végétale et favoriser le développement des alternatives et la végétalisation d’ampleur de l’alimentation, avec une réduction de moitié en 5 ans de la consommation de viande, de poisson, d’œufs et de produits laitiers.
 »

→ Lire la pétition

Une série d’enquêtes avant le Salon international de l’agriculture

Ce samedi 26 février s’ouvre le Salon international de l’agriculture, où sera présentée une image idyllique et fantasmée de l’agriculture française. En contrepoint, et pour montrer la réalité concrète de ce que vivent les animaux, L214 diffuse du 22 au 26 février 2022 une série d’enquêtes. Nous avons trouvé indispensable qu’une d’entre elles soit consacrée aux poissons et autres animaux marins, victimes incommensurables de la consommation alimentaire humaine.

Contact presse


1. Lynne U. Sneddon, « Evolution of nociception and pain: evidence from fish models », The Royal Society, 2019.
2. Version originale : « I’d imagine that the general public would be very shocked to see these images, but this is the way that fish are caught. This is large scale fisheries. It is really one of the least welfare friendly things that you could possibly do […] And I’d like to say that we would not accept this in a terrestrial farmed animal. No one would accept this kind of treatment of cows, pigs, sheep or chickens. And because it’s at sea and because it’s almost hidden from us, it’s hidden from the public. People really don’t understand the way in which fish are caught and killed. And I think we really need to raise awareness that this is how the fish are caught ».
3. Version originale : « Fish are sentient. They fulfill the criteria for sentience. They are able to form relationships within each species. For example, rainbow trout can recognise up to 47 related fish. They are able to form relationships between species. So many species will go hunting with another species. For example, the grouper on the coral reef will go hunting with the moray eels because they actually do better hunting together. They also are capable of experiencing negative emotions such as pain, fear and stress, and are very badly affected by these situations, as humans would be. But they also seek out pleasurable experiences. »
4. Version originale : « It’s effectively taking a giant plough and destroying an environment. A whole ecosystem is destroyed by this type of trawling. And there’s been many calls for the banning of this type of trawling, and especially in areas where fishes use them as nursery grounds where they leave their eggs or their young to grow, because what you’re effectively doing is destroying the nursery grounds of these animals. »

1 000 milliards de poissons tués pour la consommation humaine

Plus de 90 millions de tonnes de poissons sont pêchées chaque année dans le monde. Soit plus de 1 000 milliards de poissons tués par décompression, suffocation ou découpe à vif. À cela s’ajoutent les prises accessoires (rejetées en mer) : 7 à 20 millions de tonnes.

→ Sources sur viande.info : « La pêche »

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