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Loi Alimentation : le gouvernement reste sourd aux attentes des Français

Le 15/09/2018

Vendredi 14 septembre, l’examen du projet de loi issu des États généraux de l’alimentation se poursuivait en nouvelle lecture à l’Assemblée nationale, conduisant une nouvelle fois le gouvernement à s’opposer à toutes les mesures qui auraient pu être favorables aux animaux. Une seule disposition s’est dégagée de la discussion (malgré l’avis défavorable du gouvernement) : l’introduction à titre expérimental d’une alternative végétarienne hebdomadaire dans les cantines.

Pour Brigitte Gothière, cofondatrice de L214 : « Une fois de plus, les députés ne se sont pas engagés sur des changements concrets pour les animaux et ont définitivement renoncé à la “transformation profonde” du modèle agricole pour une “alimentation saine et durable”. Face aux souffrances infligées aux animaux et aux conséquences dramatiques de la consommation de viande sur notre santé et notre environnement, la mobilisation des citoyens sera plus que jamais déterminante, pour engager sérieusement et sereinement une transition agricole et alimentaire. »

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Une nouvelle lecture sous le signe de l’immobilisme et du renoncement

Après l’échec de la commission mixte paritaire, et dans le cadre de la procédure accélérée, les articles restant en discussion étaient ceux qui n’avaient pas été adoptés dans les mêmes termes en première lecture à la fois par l’Assemblée nationale et le Sénat. Au cours de cette nouvelle lecture, toutes les mesures qui auraient pu limiter la souffrance des animaux ont reçu un « avis défavorable » du gouvernement (par la voix du ministre de l’Agriculture M. Stéphane Travert) et du rapporteur M. Jean-Baptiste Moreau.

Repas végétariens : vers une inscription dans la loi

L’introduction de repas végétariens dans les cantines, à travers une alternative quotidienne (833, 192, 791) ou un menu hebdomadaire obligatoire (663, 191), a été longuement débattue par les députés (vidéo). Le ministre de l’Agriculture, au nom du gouvernement, et le rapporteur, au nom de la commission des affaires économiques, ont émis un avis défavorable en faisant état de la possibilité déjà existante pour les collectivités de proposer des repas végétariens, du « signal négatif aux filières », de « l’équilibre alimentaire » et du « libre choix des parents ». Des arguments fallacieux, qui ont largement été dénoncés au cours de la séance sur tous les bancs de l’hémicycle, notamment par les députés de la République en Marche (Mme Fabienne Colboc, Mme Barbara Pompili et Mme Laurianne Rossi), de la France Insoumise (M. Bastien Lachaud), du Modem (Mme Michèle de Vaucouleurs) et de l’UDI, Agir et Indépendants (M. Pierre-Yves Bournazel).
Un amendement (792), déposé par Mme Samantha Cazebonne (LREM), visant à expérimenter une alternative végétarienne hebdomadaire dans les cantines, a pu – au terme d’un vote serré – recueillir une majorité de voix des députés. Un signal fort pour près de 6 Français sur 10 favorables à la mise en place de repas végétariens dans les cantines scolaires*.

* BVA pour Greenpeace, avril 2018. Les Français et les repas végétariens dans les cantines scolaires.

Ne l’appelez plus « steak de soja » !

Le rapporteur M. Jean-Baptiste Moreau, a défendu l’interdiction des dénominations style « steak de soja » qu’il avait fait inscrire dans ce projet de loi à la lecture précédente alors même que cette interdiction entrave la nécessaire transition alimentaire. Elle a été remise en cause par les amendements (664, 790), dénoncée par M. Bastien Lachaud (France Insoumise) et M. Éric Diard (Les Républicains) dans l’hémicycle (vidéo) et critiquée quelques jours plus tôt par M. Yves Jégo, ancien député, pour lequel cette initiative contribue à construire une « barrière invisible dressée par les lobbies du monde agricole pour empêcher qu’un certain nombre de sujets ne prospèrent » (France Info, 01/09/2018).

Étiquetage : la confusion, plutôt que la transparence

Les discussions autour de l’étiquetage se sont longuement poursuivies dans la confusion. Un amendement (2119), voté en première lecture, visait pourtant à rendre obligatoire l’étiquetage des produits d’origine animale selon le mode d’élevage. Une disposition supprimée par le Sénat (342, 87, 184, 197, 259, 273), et que le gouvernement a souhaité de nouveau écarter. Seul amendement adopté dans l’article 11 septies A : l’affichage environnemental des huîtres (761). La mise en place d’un étiquetage obligatoire des modes d’élevage et d’abattage des animaux est ainsi rejetée, alors que 85% des Français considèrent les conditions d’élevage des animaux comme une information importante*.

* IFOP pour CIWF, mai 2012. Les Français et les conditions d’élevage.

Soutien à l’élevage intensif

Un amendement (670), déposé par le groupe La France Insoumise, visant à interdire les fermes-usines, a été rejeté par les députés après un débat houleux autour de la transformation du modèle agricole français (détail du scrutin). L’amendement a recueilli le soutien de M. André Chassaigne pour qui cela peut marquer un « ancrage politique » et de M. Jean-Luc Mélenchon qui a défendu l’interdiction des fermes-usines pour s’engager vers « un autre modèle agricole ». Face à M. François Ruffin, Mme Barbara Pompili, pourtant engagée contre la ferme-usine des 1000 vaches dans la Somme, a vivement désapprouvé cet amendement, reprochant un texte de « bonne conscience », un « affichage » et une « mascarade ». Pour sa part, le rapporteur, M. Jean-Baptiste Moreau, a (très sérieusement) soutenu que, dans ces exploitations, « le bien-être animal est respecté ».

« Bien-être animal » : le choix de l’illusion

L’interdiction des élevages de poules en cage (671, 822) a de nouveau été rejeté par les députés (détail du scrutin), laissant subsister la fameuse interdiction de l’installation de nouvelles cages (2347), adoptée en première lecture, alors qu’il n’existe déjà plus d’installations d’élevage en cage depuis des années. L’extension de ce dispositif à l’élevage de lapins (821, 943), déposé sur le même article, a été rejeté.
Deux autres amendements visant à demander au gouvernement un rapport sur les « alternatives au broyage à vif des poussins, des canetons et des oisons » (837) et sur « les conditions de transports d’animaux » (937) ont été adoptés. Pourtant, nous connaissons déjà les souffrances engendrées par les conditions de transport des animaux et le sort des poussins et des canetons indésirables jetés vivants par caisses entières dans des broyeuses. Ces rapports supplémentaires, coûteux et chronophages, n’ont que très peu de chances de changer le sort des animaux : ils servent surtout à créer l’illusion d’une action dans ce domaine auprès de l’opinion publique.

Démission du politique face aux lobbies

Nicolas Hulot dénonçait lors de sa démission la « présence des lobbies dans les cercles du pouvoir » (France Inter, 28/08/2018). Tout au long de l’examen du projet de loi Alimentation, la pression des filières sur le gouvernement et la majorité a été particulièrement vive, cette omniprésence a été documentée dans l’enquête de la cellule investigation de Radio France (France Inter, 01/09/2018).

Les États généraux de l’alimentation sont un rendez-vous raté avec les Français alors que 80 % d’entre eux attendaient de leurs députés un soutien aux amendements défendant la condition animale* : un acte manqué susceptible de nourrir la défiance des citoyens envers leurs institutions et qui laisse le sort des animaux d’élevage au bon vouloir des filières.

* IFOP pour L214, mai 2018. Les Français et la prise en compte de la condition animale.

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