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Restauration collective : quand la norme devient énormité

L’Association végétarienne de France, L214, One Voice et l’Initiative citoyenne pour les droits des végétariens ont adressé le 12 avril dernier à Jean-Marc Ayrault une lettre demandant l’abrogation du décret et de l’arrêté du 30 septembre 2011 sur la restauration scolaire.

Couronnée de la palme de la réglementation la plus absurde dans un récent rapport remis au Premier ministre*, cette réglementation pèche surtout par l’imposition à tous d’un modèle alimentaire désastreux, et par son caractère discriminatoire envers une partie des usagers.

Le ministère de l’Agriculture confond intérêt général et défense de filières de production particulières dans l’élaboration de la politique de l’alimentation. Les gens qui ont quelque chose à vendre (représentants de l’agroalimentaire et des filières d’élevage) ne doivent plus être représentés dans des organismes, tel le GEMRCN, qui inspirent les décisions publiques.

Notre courrier est resté sans réponse de la part du ministère de l’Agriculture ou du premier Ministre à ce jour. Certains ministères nous ont renvoyé vers le ministère de l’Agriculture. Madame la ministre des Affaires Sociales et de la Santé n’a pas de temps pour nous recevoir.

Lire la lettre au Premier ministre

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* Rapport de la Mission de lutte contre l’inflation normative, établi par Alain Lambert et Jean-Claude Boulard, 26 mars 2013, pages 22-23.


L’équilibre nutritionnel peut être assuré de multiples manières pourvu que les apports en certains nutriments nécessaires à la santé soient assurés.
Le précédent gouvernement a cependant pris le prétexte de l’équilibre alimentaire pour imposer à tous les établissements scolaires des normes rigides en termes de composition des repas. La réglementation du 30 septembre 2011 (décret et arrêté) impose notamment une hyperconsommation de produits d’origine animale : chaque menu servi dans les restaurants scolaires doit comporter un plat principal à base de protéines animales + un produit laitier.

La portée de ces textes a été étendue à la restauration universitaire et à celle des établissements pénitentiaires par décrets du 30 janvier 2012 (applicable au 1er juillet 2013).

Un modèle alimentaire immoral

Cette réglementation érige en norme :

  • des habitudes alimentaires que la planète ne suffirait pas à satisfaire si elles devaient se généraliser à tous les humains ;
  • un mode de consommation qui ne peut perdurer qu’en maintenant en place le système actuel d’élevage et de pêche industriels, dont le coût en termes de souffrance animale et d’atteintes à l’environnement est démesuré.

Par ces textes, interdiction est faite aux restaurants scolaires, universitaires et pénitentiaires d’évoluer vers une alimentation plus durable et solidaire.

En savoir plus via le site viande.info

Une entrave au « manger ensemble »

La réglementation actuelle bride les initiatives des collectivités territoriales pour accueillir tous les enfants, sans discrimination, en diversifiant leur offre.

En effet, les menus imposés par les textes en vigueur excluent de l’accès à la restauration scolaire une partie des usagers (ou ne leur laissent d’autre choix que de se contenter de repas incomplets ou contraires à leur conscience) : enfants des familles végétariennes ou véganes par conviction éthique, enfants des familles demandeuses de repas sans viande pour raisons religieuses, enfants des familles profondément engagées dans le choix d’une alimentation moins riche en produits d’origine animale pour raisons écologiques ou humanitaires.

En savoir plus via le site de l’Initiative Citoyenne pour les droits des Végétariens

Certaines communes ont pris le prétexte de ces textes pour supprimer des alternatives existantes. C’est le cas à Gonesse par exemple. D’autres communes n’ont pas changé leur politique en matière de restauration et à Strasbourg, il existe toujours un menu végétarien proposé à chaque repas.

Alimentation responsable versus conflits d’intérêt

La question des dommages environnementaux, sociaux, sanitaires… d’un modèle alimentaire très riche en produits de l’élevage et de la pêche est de plus en plus présente dans le débat public. Jusqu’à présent, en France, l’État s’est surtout préoccupé d’empêcher que cela ne nuise aux intérêts économiques des filières de productions animales.

Le 5 février 2010, Bruno Le Maire, alors ministre de l’Agriculture, déclarait « J’aime la viande et je la défendrai », et s’engageait à « répondre au coup par coup aux contre-vérités proférées sur le lait et la viande ».
Lors de ses
vœux à la presse du 26 janvier 2011, il annonçait la sortie prochaine de décrets sur la restauration collective comportant des « règles obligatoires » et indiquait : « je continuerai à défendre l’idée d’un équilibre nutritionnel qui fait sa place à tous les aliments. Et quand je dis tous les aliments, c’est tous, y compris la viande. Et je suis le premier surpris, voire choqué, par les attaques dont la viande, bovine en particulier, fait l’objet dans notre pays. »

Nous sommes dans un pays où les gentils animateurs du CIV (Centre d’Information des Viandes – émanation des filières de production) sont autorisés à sillonner les établissements scolaires et à inculquer aux enfants que c’est la viande qui apporte les protéines, sans la moindre présence d’intervenants susceptibles d’apporter un autre son de cloche.

Nous sommes dans un pays où parmi les auteurs des recommandations du GEMRCN – qui ont inspiré le décret et l’arrêté du 30 septembre 2011 – figurent des personnes qui travaillent pour le CIV, Nestlé, L’Association nationale des industries alimentaires, l’Association des entreprises de produits alimentaires élaborés, le Syndicat des entreprises françaises des viandes…

A l’heure où la vigilance envers les situations de conflit d’intérêt est à l’ordre du jour, les associations signataires de la lettre au Premier ministre espèrent que le gouvernement prêtera une oreille attentive à leur demande d’abrogation des textes qui régissent actuellement la restauration scolaire.
Ils souhaitent que, dans l’élaboration des règles futures, les pouvoirs publics prennent sérieusement en compte les enjeux globaux liés à l’alimentation. Ces enjeux sont considérables. Il en va de l’avenir de tous les habitants de la planète.

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